Hélène LY

C’est un exercice que beaucoup de recruteurs sont amenés à faire dans leur parcours (et c’est parfois un exercice imposé) En tant que recruteuse, j’ai fait des dizaines de prises de références et je n’ai jamais aimé ça. Les premières ont d’ailleurs sans doute été catastrophiques😱. En tant que candidate, j’ai pu bénéficier de l’appui et de la bienveillance de mes référents, je pense pouvoir dire que j’ai eu de la chance.

J’ai progressivement abandonné cette pratique qui, à mon sens, n’apporte aucune certitude concernant un candidat. Faire une prise de référence pour moi, c’est exactement comme appeler l’ex de la personne qui vous plaît pour savoir comment s’est passée leur relation…Personne ne fait ça! Et puis elle est particulièrement injuste dans la mesure où le candidat n’a pas la possibilité de son côté de faire une prise de référence sur l’entreprise.

Mais puisque je sais que de nombreux cabinets (entre autres) demandent systématiquement des références, j’ai pensé qu’une mise au point et quelques conseils simples pourraient aider les uns et les autres à s’y retrouver. J’ai essayé de me mettre respectivement dans la peau du recruteur, du candidat et du référent.

1/ La prise de références: késako?

De plus en plus d’entreprises et de cabinet de recrutement incluent la prise de références (ou « contrôle de références » mais je n’aime pas du tout cette expression 🙁) dans leur processus de sélection des candidats. Elle consiste à contacter les précédents employeurs d’un candidat pour confirmer/ infirmer un certain nombre d’informations suite à un entretien: durée des contrats, intitulés de poste, missions et responsabilités exercées, motifs de départ…Pour un recruteur cela consiste surtout à essayer de se rassurer et éventuellement à « compléter » l’entretien.

Elle ne devrait être ni systématique ni obligatoire mais il me paraît essentiel que chacun sachent comment bien réaliser et utiliser cette fameuse prise de références.

2/Recruteurs: restez éthiques et neutres

La prise de références est souvent vu comme un complément utile à l’entretien d’embauche mais ATTENTION vous ne pouvez pas faire n’importe quoi (et heureusement d’ailleurs…)

Ce que dit la loi:

  • D’après le Code du Travail (Art L. 1221-8-et L.1221-9): « […]Le candidat à un emploi est expressément informé, préalablement à leur mise en oeuvre, des méthodes et techniques d’aide au recrutement utilisées à son égard[…] ». Vous n’êtes pas obligé d’avoir l’autorisation du candidat mais vous devez impérativement le prévenir que vous allez contacter ses employeurs précédents/ ses référents. Cela est valable même lorsque le candidat les indique dans son CV ou sur son profil LinkedIn (et même si vous connaissez les référents en question grâce à votre réseau…STOP à la prise de référence sauvage 😡). L’idéal est d’inclure une partie « Référents » dans le dossier de candidature et de demander un accord écrit pour les utiliser, cela montre votre bonne foi et prouve que le candidat est informé.
  • Toujours selon le Code du Travail (Art L. 121-6): « les informations demandées, sous quelque forme que ce soit, au candidat à un emploi ou à un salarié ne peuvent avoir comme finalité que d’apprécier sa capacité à occuper l’emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles ». Il est donc bien évidemment interdit de poser des questions sur la religion, la situation familiale, la santé: tout ce qui touche à la vie privée et qui pourrait conduire à une pratique discriminatoire.

Au-delà du seul cadre légal, la prise de références doit être réalisée avec discrétion et dans le respect et la considération du candidat. En tant que recruteurs, si elle fait partie de vos process, vous devez l’utiliser  uniquement comme une aide à la décision et rester prudent sur les réponses que vous obtenez.

  • Si besoin, il ne faut pas hésiter à (ré)expliquer au candidat en quoi consiste la prise de références, de manière à ne pas créer de quiproquo: il y a quelques années, un candidat m’a donné comme référent son manager de l’époque (dans l’entreprise dans laquelle il était donc en poste au moment de notre entretien). Je n’ai pas jugé nécessaire de vérifier qu’il avait bien compris le principe du contrôle de références. Et évidemment quand j’ai contacté le manager en question, il est tombé des nues quand il a compris que son « poulain » cherchait du travail…Ce qui est évident pour nous ne l’est pas forcément pour les candidats.
  • Préparez la prise de référence: ça ne s’improvise pas! Il vaut mieux avoir une trame, des questions claires et précises et avoir du temps devant soi (15/20 minutes). Vous n’êtes pas en train de mener une enquête ou un interrogatoire. Prenez le temps de réfléchir à ce que vous attendez de cette prise de référence et ne demandez pas tout et n’importe quoi à votre interlocuteur. Restez factuel!
  • Prenez du recul: il ne faut pas oublier que celui qui vous donne des informations sur le candidat ne lui veut pas forcément que du bien. Vous devez donc être capables de faire la part des choses quand un référent vous donne des informations sur un candidat. Et rappelez vous qu’une mauvaise expérience dans une entreprise/ avec un employeur précédents ne signifient pas que le candidat est mauvais: il faudrait pouvoir analyse tout le contexte et l’environnement de travail. L’être humain est complexe: certains ont envie de nuire aux autres, certains ont des envies de vengeance, d’autres encore ne savent pas faire la différence entre professionnel et personnel…En bref, soyez prudents sur les retours qu’on vous donne.
  • Recoupez les informations: lorsque c’est possible je demande toujours au candidat de me donner 2 ou 3 référents, de manière à avoir plusieurs sources d’informations. Il ne faut pas se fier aveuglément à un seul référent et il est important de garder en tête ce qu’on a pensé personnellement du candidat, ce qui nous a plu, ce qu’il nous a dit (sans oublier les résultats aux éventuels tests qu’il a réalisés et réussis).
  • Faites un retour au candidat: il ne faut pas hésiter à débriefer le candidat après un contrôle de références, qu’il soit bon ou plus mitigé et même carrément mauvais. Si la prise de références est positive, ce sera rassurant et valorisant pour lui. Si au contraire on a eu de mauvais retours, il faut instaurer un dialogue avec le candidat (sans virer à l’interrogatoire) pour qu’il puisse donner son point de vue et des explications. La transparence est essentielle.
  • N’écartez pas un candidat uniquement à cause d’une « mauvaise référence »: si un candidat a menti ou caché certaines informations, essayez de comprendre pourquoi.

3/ Candidats: préparez-vous!

J’ai souvent vu des candidats déstabilisés quand on leur demande de donner des noms de référents à contacter. Les recruteurs ont la réputation de chercher à piéger les candidats et je comprends donc tout à fait que cela puisse être stressant. Le mieux est donc de bien préparer cette étape et de communiquer régulièrement avec ses référents potentiels:

  • Avant de commencer une recherche d’emploi, faites une petite liste (4 ou 5 personnes) d’anciens managers/ employeurs/ collègues soigneusement choisis et demandez-leur si vous pouvez donner leurs noms et leurs coordonnées aux recruteurs. Vous verrez comment ils réagissent: c’est un excellent moyen de reprendre contact et de « tâter le terrain ».
  • Faites en sorte d’avoir au moins un référent: ne pas avoir de référents peut vite paraître suspect aux yeux d’un recruteur mais vous avez le droit de refuser. A moins que vous soyez jeunes diplômés (et encore vous pouvez donner les noms de vos responsables de stage ou de vos tuteurs à l’école) ou que vous ayez fait toute votre carrière à l’étranger, vous avez certainement des relations professionnelles qui peuvent parler de vous à un recruteur.
  • Il n’est pas nécessaire de mentionner vos référents sur votre CV (vous pouvez éventuellement indiquer « référents sur demande »). Par contre pensez à avoir leurs mails/ téléphones à porter de main en entretien. Cela rassurera le recruteur et vous permettra de gagner du temps dans le process.
  • Quand vous êtes engagés dans un processus de recrutement et que vous avez fourni les coordonnées de vos référents à un ou plusieurs recruteurs (là encore faites une liste), prévenez-les. Il n’y a rien de pire qu’un référent qui ne se souvient plus de vous, qui hésite et qui sera pris de court par un recruteur. Donnez leurs quelques informations sur l’entreprise et le poste pour lequel vous avez postulé.
  • Ne mentez pas en entretien et soyez prêts « à vous défendre » (je sais, c’est assez déplorable). Mais n’oubliez pas que (sauf exception) vos anciens managers et collègues ne sont pas vos amis. Ils diront peut-être des choses que vous n’aviez pas prévues ou décriront des situations que vous n’avez pas vécues de la même manière. Certains mentiront peut-être, vous ne serez pas là pour vérifier. C’est pourquoi il est essentiel d’avoir une relation de confiance avec les référents dont vous donnez les noms en entretiens.

4/ Référents: restez objectifs et bienveillants!

Un de vos collègues ou une personne qui a fait partie de votre équipe/ entreprise a décidé de vous faire confiance pour parler d’elle à un recruteur. L’enjeu est important et vous avez une responsabilité envers cette personne. Il est donc essentiel de vous comporter avec loyauté et professionnalisme:

  • Donnez uniquement des informations professionnelles: cela paraît simple dit comme ça, mais on donne souvent des informations personnelles, sans s’en rendre compte. Parlez des compétences, des missions et du périmètres du poste, des responsabilités: restez factuels et objectifs.
  • Ne cherchez pas à nuire: un recruteur vous appelle pour prendre des informations sur un ancien salarié/ collègue que vous « n’aimez pas », avec qui ça s’est mal terminé? Là encore, restez factuel et faites la part des choses entre ce qui peut réellement être en lien avec le professionnalisme de cette personne et le contexte au moment où vous travailliez avec elle. Vous n’êtes pas le meilleur manager du monde, ni le collègue le plus agréable. Mettez de côté l’affectif, les rancœurs et les jalousies.
  • Soyez disponibles: ne répondez pas à un recruteur entre 2 rendez-vous, quand vous n’avez pas le temps. N’hésitez pas à demander à être rappelé à un moment où vous aurez le temps de parler calmement. On se souvient rarement de tous les détails d’une relation professionnelle, c’est encore pire quand on est pris au dépourvu.
  • N’oubliez pas que vous serez candidat: à votre tour, dans quelques mois ou années, vous serez aussi en recherche d’emploi et vous aurez peut-être besoin d’un référent. D’autres parleront de vous à des recruteurs et vous aimeriez sûrement que ces personnes soient fiables et loyales envers vous. Agissez comme vous aimeriez qu’on le fasse pour vous.
  • Faites attention à la prospection déguisée: beaucoup de recruteurs sont avant tout des commerciaux. Ils prétextent un contrôle de références sur un ancien collaborateur pour vous soutirer des informations sur votre entreprise. Il n’y a rien de grave ou de dangereux en soi mais c’est très désagréable de découvrir la vraie raison de l’appel au bout de 10 minutes de conversation…

Outil indispensable pour les uns, « étape piège » pour les autres, la prise de références est devenue incontournable dans beaucoup de cabinets de recrutement ou pour accéder à certains postes. Il faut savoir l’utiliser à bon escient et ne pas oublier que finalement il s’agit d’ un humain qui demande à un humain de lui parler d’un autre humain: c’est à la fois très simple et beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît!

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