Hélène LY

Pour beaucoup d’entre nous, rédiger un CV et passer un entretien sont des exercices difficiles. Même quand on est soi-même recruteur. Même quand on a un parcours assez linéaire et « simple » à raconter. Mais ça peut très vite se corser!

J’ai décidé d’écrire cet article après une longue pause parce que je reçois régulièrement des messages sur LinkedIn. Des personnes qui me demandent « ça fait + de 6 mois que je suis au chômage, je mets quoi dans mon CV? », « vous croyez que je peux m’arranger un peu avec les dates de ma dernière expérience? » ou encore « mon congé parental se termine bientôt et je ne sais pas ce que je vais pouvoir dire aux recruteurs » et parfois « j’ai fait une grave dépression et je ne sais pas si je dois en parler ». Pour résumer: j’ai un trou dans mon CV et je ne sais pas quoi faire.

Très souvent, on a peur de ces périodes d’inactivité professionnelle parce qu’elles sont dévalorisées et perçues comme des périodes négatives, et pas seulement par les recruteurs! On a peur de se retrouver en bas de la pile ou pire, que le recruteur n’appelle jamais.

STOP!

Un trou dans un CV c’est simplement le reflet de la vie. Ça peut être:

  • Un congé maternité/ paternité/ parental: c’est si grave que ça de s’occuper de ses enfants?
  • Un licenciement: est-ce qu’on choisit souvent de se faire licencier?
  • Une reconversion: on n’est pas obligé de faire le même métier toute sa vie!
  • Un burn out/ une dépression: beaucoup d’entre nous en ont peur et ça arrive même aux meilleurs
  • Une envie de faire autre chose, de prendre du recul, d’aller à la découverte de l’autre: la curiosité n’est pas un vilain défaut…

Bref, une période d’inactivité, qu’elle soit subie ou choisie n’a rien de honteux et ne devrait pas entraîner autant de suspicion, d’incompréhension (chez les recruteurs mais pas que) et d’angoisse chez ceux qui doivent l’expliquer (les candidats).

Alors concrètement, on fait quoi?

1/ Comment présentez ces périodes sur son CV:

D’abord, pas de panique, contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire, ça arrive à beaucoup de gens et c’est finalement très normal!

Pour être à l’aise avec des coupures dans son parcours il faut déjà les avoir comprises pour pouvoir les assumer et les expliquer. Inutile de chercher à raconter votre vie en détails sur votre CV. Cherchez plutôt à rester factuel, à montrer qu’il n’y a rien de bizarre ou d’inhabituel et que votre volonté aujourd’hui est de retrouver un poste.

Pour répondre aux questions les plus fréquentes:

  • Dois-je « tricher » sur les dates? Définitivement non. Un simple contrôle de références auprès de vos anciens employeurs (après vous avoir demandé l’autorisation de les contacter) montrerait que vous essayez de cacher quelque chose. Et le doute s’installerait pour de bon.
  • Est-ce que je mentionne mon congé parental? Oui ( (quand il est significatif donc au-delà de 3 mois)! Certains candidats m’ont dit qu’on leur avait conseillé de ne pas l’indiquer sur leur CV puisqu’on considère que pendant le congé parental, le contrat de travail est simplement suspendu. Mais là encore, même si le fait de ne pas l’écrire pourrait (peut-être) vous permettre de passer une étape, un simple coup de fil rétablirait la réalité. Dans votre CV, indiquez « De telle date à telle date: congé parental ». Et c’est tout. Il n’y a aucune honte à avoir pris du temps pour ses enfants.
  • Est-ce que j’écris « chômage »? Oui mais non. Il ne s’agit pas de masquer la réalité mais d’écrire quelque chose de plus positif (parce que le chômage est encore trop vu comme une horrible tare qui n’arrive qu’aux autres…c’est pathétique!). Si vous tenez vraiment à parler de votre recherche d’emploi, faites-le bien! Par exemple « Depuis Novembre: définition et mise en application de ma stratégie de recherche pour relever un nouveau défi professionnel ». Ou alors n’écrivez rien d’autre que les dates de votre dernier emploi.
  • Je parle de ma super année sabbatique en Australie (ou ailleurs)? Bien sûr! C’est une excellente expérience de pouvoir voyager! Mais là encore inutile de s’étaler sur son CV, sauf si vous pouvez valoriser une expérience pro (même éloignée de votre domaine), l’apprentissage d’une langue ou une expérience humanitaire. Si vous avez passé votre temps sur la plage ou à nourrir des koalas (et vous avez le droit!), ne l’écrivez pas. Indiquez simplement « Voyage en Australie ».

N’hésitez pas à ajouter une rubrique « activités extra professionnelle » dans laquelle vous pourrez parler de ce que vous avez fait pendant cette pause. Et mettez l’accent sur vos qualités (les fameuses soft skills) sans faire une liste interminable (5/6 maxi).

Dans tous les cas, vous l’aurez compris, évitez de rentrer dans les détails. N’oubliez pas que tout ce qui est écrit sur votre CV peut faire l’objet d’une question (souvent liée à une inquiétude) du recruteur. Et qu’il faudra y répondre…

2/ Comment parler des « trous » en entretiens (ce titre est bizarre non?):

Votre CV a convaincu et le recruteur vous a proposé de venir en entretien. C’est déjà une excellente nouvelle, BRAVO! Mais l’angoisse revient, liée à l’idée de devoir expliquer vos périodes d’inactivité professionnelle.

Dédramatisez! Et surtout ne venez pas en entretien avec l’idée de vous justifier comme si vous aviez fait quelque chose de mal et que vous deviez vous en excuser auprès du recruteur (je sais, c’est plus facile à dire qu’à faire vu le positionnement de certains recruteurs…).

Voilà quelques idées pour répondre à la fameuse question « et qu’avez-vous fait pendant cette période? », en fonction des situations les plus fréquentes:

  • Le congé parental: soyez factuel et restez sobre. Par exemple « j’ai choisi de consacrer ces 2 dernières années à ma famille et mes enfants. Aujourd’hui, je suis de nouveau complètement disponible pour reprendre un poste. » Ne parlez pas de vos enfants (leur âge, leur prénom, leur doudou, ne montrez pas de photo…). Cherchez à rassurer et si vous avez eu le temps de vous « remettre à jour », grâce des lectures, des cours en ligne ou autre, dites-le! Une candidate m’a un jour beaucoup fait rire en me disant « je viens de passer une année entière à parler avec un enfant, j’ai vraiment hâte de retrouver des collègues adultes, de faire surchauffer mes neurones et de manger autre chose que de la purée! ». Montrer que vous êtes MOTIVÉ!
  • Le burn out/ les problèmes personnels: là encore, restez factuels et simples, ne rentrez pas dans les détails. Nous rencontrons toutes et tous des périodes plus au moins difficiles où nous n’avons pas pu tout gérer. C’est simplement humain. Ne parlez pas du problème en long et en large, c’est votre histoire à vous. Dites plutôt « j’ai pris du temps pour gérer un souci de santé/ un problème personnel qui est aujourd’hui totalement réglé ». Si vous êtes là aujourd’hui face aux recruteurs c’est que vous avez les compétences et la disponibilité pour le poste à pourvoir.
  • Le chômage de plus ou moins longue durée: c’est probablement LA situation la plus fréquente. Qu’elle soit la conséquence d’une démission, d’un licenciement, d’une période post-étude un peu compliquée…Peu importe. Plusieurs enquêtes ont montré qu’en 2018, il fallait entre 4 et 7 mois pour retrouver un emploi! Donc ne culpabilisez pas, ne pensez pas que vous êtes nul mais ne cherchez pas non plus d’excuse.Vu l’état du marché du travail, il y a fort à parier que le recruteur rencontre tous les jours des personnes en recherche d’emploi depuis un certain temps. La recherche d’emploi est souvent un parcours du combattant qui met les nerfs à rude épreuve. Et être « candidat » n’est pas un métier (coucou l’Ecole du recrutement!). Vous pouvez tout à fait expliquer qu’il vous a fallu un peu de temps pour tourner la page, établir votre stratégie de recherche, réseauter, (ré)apprendre à passer des entretiens. Montrer que vous avez essayé même si vous ne vous y êtes pas toujours bien pris.

Si vous êtes invité en entretien, c’est que votre parcours, vos compétences, vos expériences ont attiré le recruteur et qu’il a besoin d’en savoir plus sur vous. Ne venez pas avec l’idée que vous avez commis une faute, venez rassurer et montrer que vous êtes un vrai professionnel! Même si certains recruteurs essaieront de vous déstabiliser…

3/ Je suis recruteur, comment je gère?

Vous êtes recruteurs, vous lisez un CV avec des trous ou vous recevez un candidat dont le parcours n’est pas complètement lisse? Vous avez la pression parce que vous avez peur de vous tromper?

Ne jugez pas, n’oubliez jamais que vous pourriez être à sa place (vous l’avez été ou vous le serez sans doute). Essayer de comprendre et recentrer toujours l’entretien sur les compétences et sur la motivation.

Donnez toujours l’occasion à votre candidat de vous démontrer grâce à ses différentes expériences qu’il peut être le collaborateur que vous ou votre entreprise recherchez.

Non une personne qui a pris un congé parental n’a pas perdu ses neurones!

Non, quelqu’un qui a fait un burn-out n’est pas faible!

Non être au chômage depuis plusieurs mois ne signifie pas qu’on a un problème ou qu’on n’est pas compétent!

Soyez le recruteur qui a écouté, qui a fait preuve d’empathie et de compréhension, qui a su lire entre les lignes et voir que ces trous sont finalement simplement le reflet d’une vie bien remplie et qui ne tourne pas uniquement autour du travail!

Et chaque fois que vous le pouvez, à la fin d’un entretien (qu’il aboutisse ou non) prenez quelques minutes pour donner un conseil. C’est gratuit et ça peut changer des vies.

Et vous vous avez des trous dans votre CV? Moi oui!

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