Il y a quelques années, j’avais réalisé un petit exercice qui consistait à donner 10 conseils à celle que j’étais 10 auparavant (si ça vous intéresse, le résultat est ici). J’ai eu envie de retenter l’exercice un peu différemment, en repartant quelques années en arrière pour m’adresser cette fois aux recruteurs débutants. Un moyen de prendre du recul, de regarder le chemin parcouru et de partager quelques expériences. Pour cet article, j’ai choisi le tutoiement que je n’utilise pas spontanément mais qui m’a semblé beaucoup plus adapté et naturel que le vouvoiement pour ce format.

Commençons par le début…

J’ai choisi le recrutement, un peu par hasard, quand je suis venue terminer mon Master à l’IAE de Lyon. L’idée de travailler dans les Ressources Humaines me plaisait bien même si je n’avais pas beaucoup plus d’idée ou de « visibilité » sur le sujet 🤷‍♀️. 15 ans plus tard, à bientôt 40 ans (c’est demain 😱), j’ai eu envie de revenir sur mon parcours et de m’adresser à toi qui débute dans ce métier.

Il ne s’agit pas de te donner des leçons, de te faire le coup du « à mon époque » ou du « c’était mieux avant ». Même si aujourd’hui former des recruteurs est devenu ma principale activité, je n’ai jamais eu le sentiment d’être meilleure que les autres. Je continue d’apprendre tous les jours . J’ai fait des conneries, j’ai été arrogante, j’ai eu plusieurs fois envie d’arrêter ce métier. J’ai critiqué les candidats, mes managers et les entreprises où j’ai travaillé. J’ai détesté « le système ». J’ai été en colère, j’ai été déçue, je n’ai pas toujours été respectueuse. Mais j’ai aussi eu des petites victoires et des moments de joie intense. Des réussites individuelles et collectives qui m’ont donné envie de continuer, d’essayer, de tester. J’ai reçu des merci qui m’ont (re)motivée quand j’en avais besoin et j’ai rencontré des gens formidables qui ont donné du sens à mon job et à ma vie.

Durant ces 15 années qui ont filé à la vitesse de la lumière, j’ai surtout appris que recruter ne convient pas à tout le monde. C’est un vrai métier qui nécessite des compétences et des connaissances spécifiques. Mais il y a certains points que j’ai mis du temps à comprendre et que je voulais partager avec toi aujourd’hui. Fais-en ce que tu veux. Peut-être qu’ils ne te serviront à rien, peut-être que tu trouveras que je suis à côté de la plaque. Mais peut-être qu’ils t’aideront à mieux comprendre ce métier, dans les bons moments et ceux qui sont plus compliqués.

1/ Les gens n’aiment pas les recruteurs…

Ça a été un constat assez douloureux pour moi et peut-être que ça l’est pour toi aujourd’hui. Peut-être que toi aussi, comme beaucoup de recruteurs, tu as choisi ce métier avec l’envie de changer la vie des gens, de te sentir vraiment utile, pour faire de l’Humain, (quand on y pense, cette expression ne veut absolument rien dire et à mon sens, elle a même un petit quelque chose d’arrogant. Recruter, ce n’est pas faire de l’humain, c’est surtout aider différents humains à se rencontrer au bon moment. Parenthèse terminée). Et du coup, c’est possible que tu sois déçu parce que tu n’imaginais pas qu’on puisse autant détester les recruteurs. D’ailleurs, pendant tes recherches de job, tu as peut-être toi aussi détester les recruteurs en te promettant d’être différent une fois que tu serais passer de l’autre côté.

Tu te rendras compte qu‘en général les gens ne savent pas du tout ce que fait un recruteur. Ils en ont une vague idée: le fameux triptyque annonces – CV – entretiens. Il y a beaucoup de fausses croyances, d’idées reçues, de clichés. Le recruteur est souvent désigné comme LE responsable de tous les problèmes liés au recrutement. C’est le méchant de l’histoire, celui qui ne sert à rien ou qui est juste là pour piéger les gens…C’est dur à comprendre et à accepter, surtout quand tu fais de ton mieux et que tu sais que ton quotidien est bien plus complexe qu’il n’y paraît. On voit pas mal de critiques « gratuites » sur les réseaux et ça peut parfois être violent.

💡Ne choisis pas le recrutement pour être aimé ou pour plaire et ne te vois pas comme un « sauveur ». N’hésite pas à expliquer ce que tu fais, à communiquer sur ton métier, à montrer que tu n’es ni un robot ni une personne sans coeur. Parle avec les candidats, décris leur ton quotidien et montre leur que tu n’es pas tout puissant. C’est aussi (surtout?) aux recruteurs de faire changer cette image encore très négative et de montrer que les recruteurs sont des êtres humains comme les autres. Tu peux aussi partager cet article pour parler de ton métier.

2/…et c’est souvent justifié

Là aussi, j’ai eu du mal à l’accepter mais quand il y a autant de gens qui expliquent comment ils sont mal traités (et même maltraités) par les recruteurs, tu es obligé de reconnaître que quelque chose ne va pas. Et le meilleur moyen de trouver des solutions c’est déjà de reconnaître qu’il y a un problème. Alors évidemment, tous les recruteurs disent qu’ils répondent aux candidats, qu’ils donnent des nouvelles après un entretien, qu’un entretien est une rencontre blablabla…Mais si c’était vrai, on n’aurait pas autant de témoignages négatifs de la part des candidats. Stop à la politique de l’autruche (y a pas d’émoji autruche, je suis déçue!), il est vraiment temps que ça évolue!

📢 Bonne nouvelle: tu peux faire changer les choses. Alors évidemment, tu ne vas pas révolutionner le monde à toi tout seul mais à ton niveau, tu peux essayer de faire mieux et d’avoir une pratique vraiment respectueuse et éthique du métier. Pour moi, il y a 3 points sur lesquels tu peux facilement te démarquer pour faire évoluer les mentalités:

👉 Traite les candidats comme tu voudrais que tes amis soient traités: soigne ton accueil, ne cherche pas à les piéger ou à les mettre mal à l’aise, intéresse-toi à eux, consacre leur du temps…Fais en sorte qu’ils passent un bon moment avec toi et rappelle-toi à quel point un processus de recrutement peut être une période stressante

👉 Trouve des solutions pour répondre à tout le monde: malgré tout ce qu’on pourra te dire, ça fait partie de ton job. J’y reviendrai plus en détails dans un prochain article, mais les candidats ont besoin de ton retour pour avancer. Tu n’es pas obligé de faire un truc compliqué mais tu ne peux pas simplement rester silencieux ou disparaître dans la nature

👉 Donne des conseils: tu peux faire plus que dire OUI ou NON aux candidats (et tu vas plus souvent dire non que oui), par exemple en donnant un conseil sur le CV, sur leur posture ou leur discours en entretien. Tu peux aussi leur donner des contacts dans ton réseau pour les aider dans leurs recherches. Ça prend quelques minutes, c’est hyper gratifiant et surtout c’est utile pour les candidats

En faisant ça, tu feras déjà mieux que beaucoup de gens qui font du recrutement. Et tu retrouveras ce côté humain qui t’as donné envie de faire ce métier.

3/ Trouve le « bon environnement »

Pour voir le post entier d’Anne-Sophie c’est ici

Si tu débutes dans le recrutement, tu n’as peut-être pas conscience que le job peut être très différent en fonction de la structure où tu travailles, du secteur pour lequel tu recrutes, de la culture et l’environnement dans lequel tu évolues. Quand tu n’as pas de repères, c’est difficile de savoir ce qui te convient, ce qui est « normal », ce qui fonctionne ou non.

Ces 15 dernières années, j’ai travaillé dans beaucoup d’entreprises (mon CV fait flipper les recruteurs 😂): j’avais quasiment le même intitulé de poste à chaque fois et pourtant mon quotidien et mon rôle ont été très différents dans chacune de mes expériences. Vraiment très différents.

Si ta première expérience en tant que recruteur ne te convient pas, ne tire pas de conclusion trop rapidement. Essaie de comprendre ce qui te plaît et ce qui ne te plaît pas pour distinguer ce qui est dû à ton environnement de travail et ce qui vient du job lui-même. N’abandonne pas à cause d’une entreprise qui ne te convient pas.

Plusieurs fois, j’ai eu envie d’arrêter le recrutement, j’ai pensé que ce n’était plus un métier fait pour moi, qu’il était temps que je fasse autre chose. J’ai réalisé que c’était souvent le fonctionnement des entreprises où j’étais qui n’étaient pas adapté à mon fonctionnement plus que le métier lui-même. Il y a des entreprises où je me suis éclatée et d’autres où ça a été la cata 😱 mais au global, j’ai adoré être recruteuse (et je n’exclus absolument pas d’y revenir un jour)

Quelques questions que tu peux te poser pour être bien dans ton job:

✅Est-ce que que tu as besoin d’être en contact direct avec le client?

✅ Est-ce que tu préfères recruter en interne ou pour des clients « externes »?

✅ Que représente le sourcing pour toi? (t’as le droit de pas aimer ça 😁)

✅ Est-ce que tu sais recruter « en volume »? Est-ce que tu aimes ça? (là aussi, tu as le droit de ne pas aimer!)

✅ Dans quel domaine métier/ secteur tu as envie de recruter et pourquoi?

✅ Qu’est-ce que tu aimes le plus dans le métier? Qu’est-ce que tu aimes le moins?

Il y a sûrement beaucoup d’autres questions à te poser mais ça te donne déjà une base de réflexion. Evidemment, je sais qu’on n’a pas toujours le choix, surtout quand on est au début de sa carrière. Mais si tu en sais un peu plus sur ce que tu aimes et ce qui te convient, tu auras plus de chance de bien faire ton job, d’avoir de meilleurs résultats et surtout d’être bien dans tes baskets. Plus tu te connais, plus tu as de chance de faire les « bons choix » pour toi.

Et puis si finalement tu penses que ce n’est vraiment pas un métier pour toi alors n’insiste pas: tu risques de te rendre malade et de faire du mal aux candidats…

4/ Apprends à apprendre

Le meilleur moyen de grandir, de progresser et d’apprendre à te connaître est de continuer de te former. Même (surtout?) si tu as fais de longues études et que ça ne fait pas si longtemps que tu as quitté l’école. De toute façon, je ne pense pas que tu aies appris beaucoup de choses concrètes sur le recrutement, peu importe ta formation…On prend très vite de mauvaises habitudes et « désapprendre » est bien plus compliqué qu’on ne l’imagine. Et puis la routine peut vite transformer ton job en train-train quotidien dans lequel tu risques de t’ennuyer. Sans t’en rendre compte, un matin tu diras « je crois que j’ai fait le tour du job » alors que tu n’auras fait qu’effleurer le sujet.

Prends du temps pour faire de la veille, pour lire, pour t’intéresser à des sujets connexes au recrutement: c’est comme ça que tu vas te remettre en question, rester performant, découvrir de nouveaux outils. Il y a plusieurs moments ces 15 dernières années où je me suis dit « en fait je ne sais rien sur le recrutement » et maintenant que je suis formatrice, il m’arrive de penser que plus j’apprends de choses sur le sujet et moins j’en sais 🤔

Tu peux t’inscrire à des newsletters (je te conseille celle-là), regarder un webinaire ou écouter un podcast de temps en temps ou régulièrement (regarde ceux de Recruitee par exemple) ou encore suivre une formation (si ça t’intéresse, j’en ai enregistrée une sur le recrutement des profils techs). Par exemple, prends 1 heure dans ta semaine pour ça. Et n’hésite pas non plus à suivre des formations grâce à ton CPF ou dans le cadre du plan de formation de ton entreprise. La formation est un droit.

Et prends du temps pour échanger avec d’autres recruteurs, ça te permettra d’enrichir tes pratiques et de ne pas te sentir seul (en tout cas beaucoup moins). N’attends pas d’être « en galère » pour développer ton réseau, prends l’habitude de le faire tout au long de ta vie pro. Tu peux suivre/ contacter des recruteurs sur LinkedIn, jeter un oeil au slack Recruiter’s kitchen, t’intéresser aux communautés/ groupes/ meetup autour du recrutement. N’hésite pas aussi à regarder ce qu’il se passe à l’étranger (Recruiting Brainfood par exemple).

Et surtout, n’oublie pas 👉 n’aies jamais peur de dire « je ne sais pas ». Il n’y a rien de honteux et c’est de cette manière que tu progresseras. Faire semblant de savoir ne te rendra pas plus crédible, au contraire…

5/ N’accepte pas tout

C’est ce qui me semble le plus simple et le plus difficile à la fois, parce que tu devras accepter de faire des compromis mais tu auras besoin de fixer tes limites, par respect pour toi et pour les candidats. Et l’idée n’est pas de claquer la porte à chaque fois qu’on te demande de faire quelque chose qui va à l’encontre de tes principes (sinon tu risques de démissionner souvent…)

Evidemment, savoir dire non, cela ne concerne pas que les recruteurs. Mais quand tu recrutes on te demande parfois de « fermer les yeux » ou carrément de participer à un système discriminatoire: recruter uniquement des personnes diplômées de certaines écoles, recaler les candidats de + de 50 ans, donner la priorité à un homme, écarter les CV dont le nom est un peu trop « exotique »… Peut-être que cela ne te posera aucun problème (dans ce cas interroge toi quand même un peu sur tes valeurs🙄. Oui je te juge 😁 ) mais il est probable que tu le vives assez mal. Surtout que pour les candidats, le responsable ce sera toi (CF le point 1).

Il y a une phrase à laquelle j’ai beaucoup pensé quand j’étais en poste. C’est une citation qu’on attribue à Marc Aurèle « Que la force me soit donnée de supporter ce qui ne peut être changé; et le courage de changer ce qui peut l’être; mais aussi la sagesse de distinguer l’un de l’autre« . Il y a des choses pour lesquelles ça vaut la peine de se battre: à toi d’identifier sur quoi tu peux agir là où tu travailles! Tu devras faire preuve de diplomatie, trouver les bons arguments pour convaincre et parfois tu devras renoncer. Identifie aussi celles et ceux qui peuvent t’aider, tu as forcément des personnes sur lesquelles tu pourras t’appuyer.

Mais s’il te plaît n’accepte pas qu’on te dise « on a toujours fait comme ça » ou « on ne changera pas » si tu es convaincu que quelque chose ne va pas (surtout si c’est illégal). Bien sûr, je ne te dis pas de te mettre en danger mais de ne pas avoir peur de dire non ou de rappeler la loi lorsque cela te semble nécessaire.

Pour terminer

J’aurais encore beaucoup de conseils à te donner si tu as décidé de te lancer dans le recrutement (je finirai peut-être par en faire un bouquin 😏). Des choses plus concrètes comme le fait d’insister sur la définition du besoin, de soigner la rédaction de tes annonces, d’apprendre (vraiment) à faire du sourcing etc…Mais l’idée de cet article était surtout de te donner un « état d’esprit » pour t’aider à être acteur de tes choix, même si tu débutes.

Recruter c’est un métier passionnant, riche, complexe parfois. C’est un métier de rencontres mais c’est aussi un métier partenaire du business et de la croissance. C’est une fonction beaucoup plus stratégique qu’on ne l’imagine et qui manque encore cruellement de reconnaissance. Mais tu peux faire changer les choses. C’est comme le changement climatique: si on attend que ce soit les autres qui aient une prise de conscience et qui fassent les choses, on est foutu. Si on décide d’agir, chacun à notre niveau, on obtiendra des résultats, même si ça semble être une goutte d’eau dans l’océan 🌊…

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